Les combats de tranchées à Massiges

(Armes et munitions ont été démilitarisées et neutralisées)

Restes de cartouchière allemande de Mauser

Dans la seule armée française, près de 900 hommes meurent chaque jour entre 1914 et 1918.

Ils sont 1300, du côté allemand.
86% des décès auront lieu sur le champ de bataille, contre 14% par maladie ou en captivité.

"Le sang nous est compté."

gris

Paquet de pansement individuel distribué à chaque homme (non trouvé dans la craie)

Tout blessé qui ne pouvait pas revenir seul était voué à une mort presque certaine, par épuisement, nouvelles blessures ou écrasement.


"Les diagnostics sont effarants : plaies pénétrantes de poitrine, du ventre, plaies pénétrantes du crâne par balle. Un des blessés a la figure comme une boule de sang, la mâchoire inférieure fracassée. Nous n’avons rien pour les nettoyer. Nous avons à peine assez d’eau pour laver nos mains pleines de boue.

On passe les plaies à la teinture d’iode, qui fixe le sang.

Les blessés sont très choqués, mais en 1915, en première ligne, nous n’avons rien comme antichoc.

Il ne faut pas songer à faire des transfusions intraveineuses ; rien n’est propre.

Les transfusions sanguines sont tout aussi impensables ; on ignore les groupes sanguins et autres groupes Rhésus. Après un nettoyage de plaies, on applique de gros pansements tout préparés de l’armée, pratiques peut-être, mais absolument inopérants."

(Louis Maufrais, J’étais médecin dans les tranchées, 2008)

gris

Main de Massiges, blessé

gris

"La côte 191 va maintenant rester en possession des français pendant des mois.

De nombreux blessés ne peuvent être ramassés que pendant la nuit. Il faudra quatre nuits et des efforts considérables pour ramener certains blessés qui se trouvaient près de la position française.
Le médecin auxiliaire de réserve ira avec un groupe d’infirmiers et le drapeau sanitaire jusqu’à la position française et pourra sans déclencher un coup de feu ramener encore quelques blessés.

La plupart était d’ailleurs déjà morts."

(Historique allemand-les combats pour la côte 191, Massiges, 26 et 29 septembre 1914)

Vertèbre dans un bloc de craie

"Je m’agenouillai pour lui arracher un lambeau de capote et le couvrir.

Mais je pensai qu’il valait mieux que le soleil vît cela, et j’aurais voulu avoir des bras assez forts pour le soulever jusqu’au ciel, et le montrer à l’univers." 

(Paul Cazin, l’humaniste à la guerre, 1920)

Fusil Lebel


Il fût le principal fusil français lors de la Grande Guerre et les soldats l’appréciaient  pour sa robustesse et sa précision, mais sa longueur- 1,80 mètre avec la baïonnette- le rendait d’usage très peu pratique dans les tranchées étroites de la guerre de position.

Petit boite française de graisse pour fusil

Cartouches de Lebel - boite de sardines

gris

Cartouche  française de Lebel/MONTEE AUX TRANCHEES

"Difficile d’imaginer les soldats portant leurs 30 kilos de munitions et de nourriture et montant dans la nuit, sans bruit, en première ligne. Des marches de plusieurs heures avant d’atteindre le boyau qui s’étend sur plusieurs km et mène jusqu’à la tranchée ou le chaos de trous d’obus qui en tient lieu.

Ici régnaient les cris des blessés et les hurlements des bombes.

Ici, on se perdait pour se trouver sans crier gare devant l’ennemi, on reconnaissait l’obus à son sifflement.

Chacun sait que, dans quelques minutes, il peut offrir sa tête, son torse, ses jambes à la mitrailleuse qui déjà se prépare." 

(Vincent Tremolet de Villers, le Figaro 2006)

Secteur Main de Massiges. Mitrailleuse en position dans un abri souterrain avril 1916

Baïonnette  « Rosalie »

Elle n’est pas une lame mais une pique cruciforme redoutable et très pointue.
Le surnom de « Rosalie » fût très modérément employé par les Poilus.

Il fallait en effet être un amuseur public de l’arrière pour s’imaginer que le fantassin considèrait sa baïonnette comme une compagne et lui donnait  un surnom affectueux !
Lors des corps à corps, épreuves redoutées entre toutes par les soldats, l’angoisse était presque insupportable quand retentissait le fameux ordre de « baïonnette au canon !»
Rendus dans la tranchée, les fantassins avaient le plus grand mal à manœuvrer un objet aussi long.

La baïonnette étant inutilisable à la main, les soldats la remplacèrent par des pelles de tranchée et des casse-têtes de bois ferré appelés « massues de tranchées ».


"Ce matin on nous a donné double ration d’eau de vie.

Imagine ce que peut être un assaut à l’arme blanche, ces aciers fins et blancs au bout des fusils tenus par nos mains crispées.

Ce combat est ce qu’on peut demander de plus terrible à nos pauvres corps faibles, mortels.

On respire un bon coup avant de plonger, avant le bond dans l’inconnu.

J’ai peur de l’inconnu, peur de sortir, peur de me battre.

Avec une sorte d’inquiétude animale, serré les uns contre les autres, tous se taisent.

Nous sommes cinquante empilés dans ce réduit, si serrés que nous ne pouvons faire de mouvements.

Nos pieds enfoncés dans la boue se gèlent avec elle.

Debout, j’ouvre les yeux et la terrible réalité m’apparait : nous allons partir à la mort.

Nous finissons par marcher dans un demi-sommeil, inconscient, sans ordre sans voir et sans pensée, comme des bêtes dans cette atmosphère où l’on sent la mort, insaisissables.

On entend des cris, des ordres d’on ne sait où. Le signal de départ vient d’être donné.

Les fusils commencent à claquer et bientôt un barrage acéré tombe sur nos unités.

Bientôt, ce sont des cris, des hurlements d’horreur. Des hommes tombent, cassés en deux dans leur élan.

Il faut franchir la plaine balayée par les balles, les membres disloqués, la figure noire, horrible.

Nous arrivons près d’eux et un terrible corps à corps s’engage.

Les fusils ne peuvent plus nous servir et c’est à l’aide de nos pelles que nous frappons.

On titube.

On voit un tourbillonnement d’hommes qu’on ne reconnait pas, qu’on n’entend plus.

Je saigne du nez et des oreilles, je suis fou, je ne vois même plus le danger, je n’ai plus songe à rien, mon rôle est fini."

(Louis Corti du 30e  RI)

Massue allemande « casse-tête »

Couteau de tranchée


Les troupes d’assaut spécialisées dans le « nettoyage de tranchées » créées  à partir de 1915, optèrent pour le revolver, la grenade et le couteau de tranchée.

 "Le couteau surtout faisait honte à porter.

Quoique l’ennemi eût depuis plusieurs mois militarisé cet outil d’abattoir, plus pratique en tranchée que la baïonnette, il répugnait à nos hommes.
« Avec ça, disaient-ils, on a l’air de bandits ! On veut bien fusiller les Boches ; mais ça vous dégoûte de les égorger. La guerre n’est tout de même pas un métier d’assassin ! »
(Joseph Raymond, Froc et Epée, 1919)


 Je te dirais chère Louise que le temps que j’étais en permission, on m’a trouvé une jolie place.

Ça c’est vrai qu’on ne m’a pas demandé mon consentement. Car je leur aurais dit non.

Et bien on m’a mis nettoyeur de tranchées.

On va nous donner un revolver, un poignard et le fusil. Et tous les boches qui ne seront pas crevés, on les finira ou nous finirons.

Tu peux croire que c’est une drôle de besogne…

Ils auraient fait de donner cette place à quelques assassins qu’à moi.

Mais comme je te l’ai dit, ils me savent bon pour les boches à crever là où à un autre endroit c’est toujours pareil." 

(Extrait d’une lettre d’un soldat du 142e RI, 1915)

Pelle de tranchée

"Merde ! Encore creuser, toujours creuser.

Faites votre trou, creusez cent fois votre tombe.

Votre peau, il faut que vous la défendiez nuit et jour.

Toutes les forces de destruction se conjuguent pour vous assassiner.

Votre peau, il faut que vous la disputiez aux obus qui vous pourchassent aux contre-pentes, aux mitrailleuses qui vous abattent par colonnes entières, au ciel même qui crache du fer et du feu.

Creusez mes camarades, pas de repos pour vous, pas de répit pour vous, pas  de sommeil avant celui qui vous attend, rigide, froid, éternel.  (Naegelen, les suppliciés, 1927)

La baïonnette  a perdu de son importance (…) la pelle bien aiguisée est une arme plus commode et beaucoup plus utile ; non seulement on peut la planter sous le menton de l’adversaire, mais, surtout, on peut assener avec elles des coups très violents ; spécialement si l’on frappe obliquement entre les épaules et le cou, on peut facilement trancher jusqu’à la poitrine."  

(Erich Maria Remarque, à l’ouest, rien de nouveau, 1928)

Pistolet automatique Ruby utilisé par les nettoyeurs de tranchées

Cartouchière allemande de Mauser

Paire de cisailles françaises/FILS BARBELES

"Offensives vaines, camarades accrochés aux barbelés, d’autres se noyant dans la boue nourrie du sang des morts, les gaz, les pilonnages, les poux, les rats, le froid, la maladie. 

Les tranchées ennemies étaient faiblement tenues, mais leurs flanquements par mitrailleuses avaient été bien étudiés, et les fils barbelés qui les couvraient, montés sur des piquets de fer, étaient d’un diamètre tel que nos meilleures cisailles ne les mordaient point.

Pour y ouvrir des brèches, il eût fallu des torpilles, et une débauche d’artillerie."  

(Louis Guiral,  je les grignote, Champagne 14-15, attaque du 25 septembre 1915)

"Nous sommes assis tous deux sur un rouleau de fil de fer qui nous sert de lit et de chaise en même temps."
(Francis Theurey, 57e RI, écrit de la tranchée le 31 décembre 1915)

gris

Plaque allemande de tireur